Ce post est le premier de Fagny, l’un des membres de ce trio de soeurs.
C’est une tribune, une réaction à chaud après un évènement anodin qui en réalité n’en est pas: un repas dans un contexte de travail, un geste déplacé qui en révèle beaucoup, et une réaction de (fausse) naïveté et d’ignorance. Une anecdote qui nous rappelle surtout que tout politisé. A la lumière du texte et de la chanson de Solange Knowles, Don’t Touch my hair, voici la lettre ouverte de notre Mam’zelle Bulle:
(L’illustration est d’un jeune illustrateur sur la scène parisienne ultra doué @benbiayenda.
Et si on parlait cheveux?
J’ai les cheveux noirs, bouclés, « naturels »
Je suis une femme noire avec des cheveux naturels longs
Et je ne permets à personne de toucher mes cheveux
Ce n’est pas parce que je les porte fierement que toi, tu peux les toucher
Ce n’est pas parce que tu n’as pas l’habitude de voir des cheveux longs noirs bouclés, que tu peux les comparer à un coussin, à un animal quelconque
Ce n’est pas parce que je les coiffe différement que mes semblables que je te permets de les analyser comme s’ils étaient anormaux et de les qualifier de touffe.
Oui, mes cheveux sont noirs
Oui, ils sont bouclés
Mais non, tu ne peux pas les toucher
Je n’ai pas à éduquer les gens à la nature de mes cheveux, des cheveux longs, noirs et bouclés.
Ouvre les yeux.
Nous sommes tous différents : nos yeux, nos mains, notre incarnation, notre taille, nos ongles..
Te permets tu de toucher les poignets de tes collègues ? les oreilles d’inconnus rencontrés dans la rue ?
Suis je considérée comme un meuble qu’on peut toucher sans sa permission car son apparence nous intrigue ?
Suis je l’objet que l’on palpe afin d’assouvir une curiosité passagère ?
Mes cheveux, je les entretiens, je les nourris, je les tresse, je les lave, je les huile, je les aime.
C’est un choix que j’ai fait.
Un choix privé, intime.
Toi, étranger à mon être, inconnu à mon espace personnel, de quel droit te permets tu d’enfreindre les règles même de vie en sociète ? N’ai je pas le droit à la distance sociale propre à notre type de relation ?
Considères tu que TOI curieux tu peux tout car toi tu fais parti de cette majorité visible ?
Non tu ne peux pas toucher mes cheveux
Non je ne suis pas un accessoire mis à ta disposition
Tu ne peux pas t’imposer à mon intimité comme ça
Mes cheveux sont niors, longs, bouclés
Différents des tiens.
D’abord par leur nature mais aussi pour ce qu’ils représentent.
Ils ne sont pas ceux des dictats de la mode.
Ils sont noirs, longs, bouclés.
Ils sont ceux d’une femme d’ascendance africaine.
Ils sont ceux d’une descendante d’esclaves.
Ils sont ceux d’une descendante de colonisés.
Il sont ceux d’une femme reconnaissante du travail de Dieu
Je ne suis pas mes cheveux.
C’est l’Histoire qui en a fait un symbole d’insoumis, de fierté
C’est le regard de la société qui en a fait un moyen d’affirmation de soi
Ce sont les « Je peux toucher » et toutes tes remarques sur leur aspect qui ont poussé des artistes à placer ce théme dans leurs écrits.
Ce sont tes comparaisons à tous les félins & cie qui obligent des auteurs à écrire, polémiquer sur le sujet.
C’est ton manque d’ouverture sur les minorités visibles qui ont crée des réactions extrêmes.
Alors, non, tu ne peux pas toucher mes cheveux.
Mais, toi, l’autre, tu peux accepter les différences.
Mes cheveux sont ceux d’une femme noire.
Ils sont longs, noirs et bouclés.
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